Comité de Défense d’Action et de Sauvegarde de Fontainebleau


Blason

L’Hôtel de Ville

de

Fontainebleau


 Il a été créé grâce à la générosité du roi Louis XVI, de Napoléon 1er et au dévouement du comte de Montmorin, les bellifontains élus devront avoir à coeur de rétablir les plaques commémoratives et nom de rue en reconnaissance de leurs bienfaits pour la ville.

Sommaire :

 Origine de l’Hôtel du Maine - naissance et croissance - le comte de Montmorin-la maison de la rue Basse - l’hôtel de eaux et forêts-la cour des cuisines - à la recherche d’un hôtel de ville-l’hôtel du Maine et de la vénerie-le roi Louis XVI - l’hôtel de la chancellerie - la maison de la mission - le premier consul - le décret de Boulogne - retour à l’hôtel du Maine - la ville définitivement propriétaire en 1889.

Origine de l’hôtel du Maine :

 Le comté du Maine a toujours appartenu à des princes du sang, le dernier a été le duc d’Alençon, frère d’Henri III mort en1584, il faut arriver aux lettres de Louis XIV de décembre 1876 pour trouver un duc du Maine, son fils légitimé, Louis Auguste de Bourbon, né de Madame de Montespan, alors âgé de 6 ans. Peu de temps après, en 1678, que le roi fait l’acquisition de l’hôtel de l’Épargne et dès 1679 apparaît le nom de l’hôtel du Maine. l’hôtel de l’Épargne était situé rue Basse avec un droit de passage sur la grande rue. L’hôtel du Maine dès sa création est une propriété du duc du Maine. À son décès, à son fils le comte d’Eu, le duc de Penthièvre en hérite et le vend au roi Louis XVI moyennant 9,000 livres, et le roi y installa les écuries de la Vénerie.



I

NAISSANCE et CROISSANCE


 Le roi Louis XVI, qui affectionnait particulièrement la ville de Fontainebleau, la dota le 31 janvier 1784 d'une administration locale. Ce commencement de municipalité était composé d'un maire, de deux échevins, d'un procureur du roi syndic, d'un secrétaire-greffier et d'un receveur.
 Ce corps municipal de fraîche création reçut une investiture officielle le l2 octobre 1785. Ce jour-là, dit la Gazette de la Cour, il a été présenté au Roi par le duc de Gesvres, gouverneur général de l'Ile de France, et accueilli par S. M. avec la plus grande bienveillance.
 Si rudimentaire qu'elle fût, cette administration était bien suffisante. A cette époque, la cassette royale pourvoyait à tous les besoins de la cité et assurait généreusement le service de l'assistance publique, l es menues taxes dont étaient chargés les habitants produisaient un revenu d'environ 5,000 livres destiné surtout à couvrir les frais de balayage et d'éclairage. Un aussi mince budget n'était pas difficile à administrer.
 Le calme régna jusqu'en juillet 1789. A la suite de la prise de la Bastille, la France fut ébranlée jusqu'aux provinces les plus reculées. La paisible petite ville de Fontainebleau, où beaucoup de familles étaient venues chercher le calme, n'échappa point à l'agitation générale. La journée du 25 juillet fut signalée par une émeute inexpliquée, accompagnée d'actes de vandalisme. La fureur des émeutiers parut se porter particulièrement sur les boutiques de bouchers. Ces boutiques, au nombre de douze, établies sur le terre-plein de la place au Blé, au centre du marché qui alors se tenait dans la Grande Rue, furent entièrement démolies.

 Était-ce parce que terrain et boutiques appartenaient à la famille du maire, M. Jamin de Changeart, fils et petit-fils des deux derniers prévôts, prévôt lui-même et de plus investi des fonctions de subdélégué de l'Intendant de la province ?
 La conséquence de ces événements fut la chute de la municipalité et son remplacement par une commission désignée sous le nom de Comité civil et de police, dont les membres furent plus ou moins régulièrement élus à l'instigation de quelques ambitieux pressés de jouer un rôle prépondérant. Le roi sanctionna cependant la nomination de ce comité et reçut ses délégués à Versailles. Le trouble n'engendre pas le travail ; aussi la misère devint-elle grande. Les délégués ne firent pas un vain appel à la bienfaisance du roi qui les congédia avec un subside de 6,000 livres destiné à pourvoir de vivres les familles indigentes.

 Si la vie municipale à Fontainebleau a pu commencer dès 1784, elle ne remonte en réalité qu'au 14 décembre 1789, date du décret de l'Assemblée Nationale portant organisation uniforme de l'administration communale par toute la France. Nos édiles pourront donc célébrer ainsi cette année, leur centenaire.
  Aux termes de ce décret, le conseil municipal était élu par l'assemblée générale des citoyens actifs, laquelle devait nommer ensuite un nombre de notables double de celui des membres du corps municipal. Par l'adjonction de notables se formait le conseil général de la commune. Ces notables n'étaient pas appelés à délibérer sur toutes les affaires ; le maire les convoquait seulement lorsqu'il s'agissait de questions importantes. Ils ont été depuis remplacés par « les plus imposés » supprimés depuis 1884.
 En exécution de la loi nouvelle, des élections eurent lieu en janvier 1790; il en sortit un conseil municipal et un conseil général du bourg royal de Fontainebleau ainsi composés :
   Maire : M. le comte Louis-Victore-Hippolyte-Luce de Montmorin, gouverneur des château et bourg de Fontainebleau.
   Conseillers : MM. Marquis, bourgeois ; Hulot, avocat; Martinet, marchand ; Rondeau, maître de poste ; Besnard, avocat ; Lisle, ancien procureur; Marchand de Choisy, entrepreneur des ponts et chaussées ; Geoffroy le jeune, maître menuisier.
   Procureur syndic : M. Bénard-Saint-Étienne, notaire.
   Notables : MM..Piat, garde général ; Martin, chirurgien ; Langlois, fourrier des logis du roi ; Pauly (Magloire), entrepreneur ; Fessard aîné, marchand ; Rousse.



II

LE COMTE DE MONTMORIN

 Les réunions de nos édiles ne restèrent pas longtemps aussi calmes. Tous les pouvoirs locaux se trouvant réunis entre leurs mains, ils ne tardèrent pas à être écrasés d'affaires diverses et nombreuses dont les événements grossirent l'importance.
 Au milieu de difficultés sans nombre et sous l'affectueuse et bienveillante direction de M. de Montmorin dont l'attachement aux intérêts de Fontainebleau fut de toute heure, le conseil poursuivit consciencieusement sa gestion pendant un peu plus de dix-huit mois.
 Quelques lignes d'hommages reconnaissants nous semblent dues au premier maire de Fontainebleau que sa vie toute de dévouement et de bienfaisance n'a pu soustraire aux assassins.

 Serviable et bon, respecté et aimé de tous, M. de Montmorin, à peine âgé de 27 ans, exerçait ici une salutaire influence ; il était d'ailleurs animé d'une vive affection pour Fontainebleau ; il y était né, il y avait presque constamment résidé. Son père, son aïeul, son bisaïeul, y avaient occupé successivement la charge de gouverneur dont il était devenu titulaire depuis peu. En faisant le bien autour de lui, il suivait une tradition de famille. La confiance que lui accordait le roi lui permettait d'attirer sur sa ville natale des faveurs exceptionnelles, des immunités financières. Ces avantages furent appréciés plus tard — trop tard — lorsque les malheureux habitants de Fontainebleau jusqu'alors menant une vie contemplative, écrasés de contributions, eurent à payer 150,000 livres rien qu'au titre de don patriotique.
 Les rêves d'émancipation — dans ce pays plus qu'émancipé puisqu'il était exempt de charges — se faisaient jour néanmoins. Parmi les membres du conseil municipal s'en trouvaient certains que les idées du moment sollicitaient avec plus de vivacité. Mais il y avait encore un souverain, tout au moins bon à leurs yeux pour fournir aux dépenses locales. Ceux-là même, tout autant que leurs collègues, faisaient bonne figure à M. de Montmorin, leur utile intermédiaire auprès du roi et n'auraient osé fronder sa légitime popularité. Le conseil a eu plusieurs occasions de manifester ses sentiments envers M. de Montmorin.
 Lorsque dès octobre 1789 le comité municipal permanent nommé, remplaça le trop fameux comité civil dont la courte gestion de deux mois seulement fut désastreuse, la voix publique désigna M. de Montmorin, déjà commandant général de la milice municipale, pour présider la nouvelle assemblée. Son acceptation fut motivée par la lettre suivante :  

Paris, 29 novembre 1789.

 J'ai reçu, messieurs, avec beaucoup de reconnaissance, la délibération des représentants de la commune du bourg royal de Fontainebleau. J'ai été extrêmement flatté de la confiance que vous voulez bien me témoigner avoir en moi. Je répondrai, je vous assure, par le dévouement le plus entier, à tout ce qui pourra contribuer au bonheur de la commune. Ce sera, dans tous les temps, mon occupation la plus chère.
 Je ne crois pas pouvoir balancer dans le choix que vous voulez bien me proposer. J'accepte la présidence, tenant fort à l'honneur d'avoir celui de siéger parmi vous.
 Recevez l'assurance de la reconnaissance, etc.

Montmorin

 « Laquelle lecture, dit le procès-verbal, a été suivie des applaudissements les plus vifs et les plus réitérés, comme un gage certain de la satisfaction que toute la commune éprouve envoyant à sa tête un chef aussi distingué. »
 Plus tard, dans la séance du 28 novembre 1790, se produit un incident personnel à M. de Montmorin.
 Certains de ces mécontents qui veulent, toujours quand même, mal à ce qui existe, avaient exhalé des plaintes au sujet de quelques absences — justifiées cependant — faites par le maire, bien que dans ces circonstances l'administration fût assurée par M. Marquis, délégué à cet effet. M. de Montmorin crut devoir offrir sa démission. Le conseil municipal s'empressa de prendre la délibération motivée ci-après :

 M. de Montmorin, affligé des propos qu'on avait tenus dans une section à cause de quelques absences justifiées par la maladie ou des missions importantes, absences en contradiction avec son attachement pour les habitants, doutant de la confiance dont l'ont honoré ces mêmes habitants, a manifesté le désir de se démettre de ses fonctions.
 Cette démission a été unanimement repoussée comme contraire au bien de la commune. Ses représentants ont rappelé tous les services déjà rendus par le maire et ont vivement exposé les secours que son zèle a fait annuellement obtenir pour les pauvres et de manière qu'il a été unanimement arrêté que personne ne pouvait mieux que le maire faire le bien et défendre les intérêts de la commune, surtout auprès de la personne de Sa Majesté dont les bontés font toutes les ressources et presque toute la richesse de la ville, il serait instamment prié au nom de tout le conseil général, stipulant fit pour tous les citoyens, de vouloir bien conserver sa place pour ne pas les affliger et leur ôter leur plus grande espérance, pour encore aider les membres de ses lumières et de ses sages conseils lorsqu'il serait parmi eux et pour protéger la commune auprès du Roi lorsqu'il serait absent.
 Il a été arrêté que le conseil général lui manifesterait la confiance qu'il avait en son attachement particulier pour les membres qui le composent, pour être certains d'une déférence dont ils lui auraient une obligation proportionnée aux sentiments de zèle qui les attachent chacun en particulier aux habitants qui les ont honorés de leurs suffrages et qu'une expédition de la présente délibération sera remise à M. le maire, à la diligence du secrétaire.

    Ont signé les membres présents : marquis, lisle, grenqn, dieppe, dassy, duchemin, martinet, roussereatj, deroy, L. marchand, lebaigue, lucas, avril, lecourayer, hulot, geoffroy jeune.

 M. de Montmorin, ému en recevant cette communication, a écrit de sa main sur le registre qui lui a été présenté :

 J'ai signé la présente délibération, mais en protestant contre les éloges que l'on a bien voulu me donner. Je désirerais avoir mérité ce que cette délibération contient de flatteur pour moi et ceci aurait augmenté mon amour pour Fontainebleau si on pouvait rien ajouter à celui que j'ai pour tout Fontainebleau en général et en particulier pour tous les citoyens qui se trouvent dans son sein.

MONTMORIN

 Le maire de Fontainebleau qui aurait pu émigrer, resta fidèle à ses fonctions, malgré le vide qui se faisait autour de lui. Toutefois, le soin à donner à ses propres intérêts fort compromis, et aux affaires de la ville, l'appelait souvent à Paris. Lorsque parut le décret enjoignant à tous les fonctionnaires de rester à leur poste, il crut devoir en référer au conseil municipal.

 « Je sais, écrivait-il le 26 juillet 1792, que je dois me rendre à mon poste aux termes de la loi, mais attendu la quantité d'affaires que me donne depuis dix-huit mois la mort de mon beau-père et de ma belle-soeur et celles dont je suis chargé pour la commune (recouvrement de quelques créances), je prie la municipalité de m'autoriser à rester à Paris. Si cette autorisation ne peut m'être donnée, je me verrai forcé d'abandonner un poste que j'ai toujours été flatté d'occuper (1). »
 Et aussitôt le conseil de prendre la délibération qui suit :

2 août 1792, — Le conseil général de plus en plus reconnaissant des peines et des soins que s'est donné dans tous les temps et que se donne encore aujourd'hui M. de Montmorin pour tout ce qui peut intéresser la commune, notamment les deux articles de recouvrement qu'il poursuit pour elle,

 (1)A cette lettre étaient joints deux certificats de juges de paix de Paris.Considérant qu'il est impossible d'exiger de lui le sacrifice de sa fortune et celle de sa famille, pour la seule satisfaction de le posséder plutôt que pour l'intérêt réel de la commune que l'on espère ne devoir pas être plus compromis à l'avenir par le seul effet de son absence qu'il ne l'a été jusqu'ici, voulant et devant en outre lui donner tous tes témoignages d'approbation et de satisfaction qu'il peut désirer et qui lui sont dus, a arrêté :
 Oui le procureur de la commune,
 Qu'il serait donné à M. de Montmorin, acte du consentement que lui a donné par sa délibération du 26 juillet et que lui réitère par la présente le conseil général à ce qu'il reste à Paris non seulement tout le temps que les deux articles de recouvrement mentionnés en ladite délibération et dans la lettre dudit jour, mais encore ses affaires propres dont il a donné connaissance par les deux certificats sus-énoncés, exigeront sa présence à Paris, qu'à cet effet extrait de la présente délibération lui sera adressé.

 Une procuration pour terminer les affaires de la ville lui était adressée cinq jours après.

 Mais arrive la sanglante journée du 10 août. Malgré tous les services rendus, bien que n'ayant jamais transgressé le serment qu'il avait prêté le 7 novembre 1789 avec tous ses collègues, « d'être fidèle à la Loi et au Roi, d'exécuter les décrets » de l'Assemblée et les ordonnances de Sa Majesté, et de s'occuper du bien public » en général, particulièrement de celui de la commune de Fontainebleau », M. de Montmorin est arrêté dans son hôtel à Paris (1) et traîné en prison. Une perquisition est ordonnée le 22 août dans l'hôtel du gouvernement à Fontainebleau. On ne trouve, bien entendu, rien de suspect et la municipalité chargée de cotte pénible mission, se contente de mettre les scellés sur la bibliothèque..
Noble et frère d'un ministre de Louis XVI, il ne pouvait manquer d'être au nombre des victimes de la justice expéditive des Terroristes. Dix jours après, le 12 septembre 1792, son frère et lui étaient massacrés à l'Abbaye. Né le 13 décembre 1762, M. de Montmorin n'avait pas encore atteint sa trentième année.

Nos lecteurs nous sauront gré, sans doute, de leur avoir fait connaître le noble caractère et le coeur excellent de ce digne enfant de Fontainebleau, dernier représentant d'une illustre famille dont plusieurs générations ont répandu leurs bienfaits dans le pays.
 M. de Montmorin disparu, la révolution prenant un caractère de plus en plus violent, notre conseil municipal fut dispersé.

  (1) L'hôtel de Montmorin était situé rue Plumet, aujourd'hui rue Oudinot, au n° 27, presque en face de la rue Monsieur. Depuis, propriété du général Rapp, il est actuellement occupé par la maison mère des FF. de la doctrine chrétienne.


 Le 5 septembre 1792, s'assemble un nouveau conseil qui, dans son procès-verbal de prise de possession, reconnaît luimême avoir été nommé « par acclamation ».

En voici la composition :
 Maire :M. Marquis.
 Membres : MM. Garot, Dieppe, Duchemin, Noël, Cellier, Clouette Courtin Bellot, Gauthier, procureur de la commune.  Notables : MM. André, Thomasse, Godin, Guilleminet, Guillory, Billoy, Gremillet, Spendler, Curdel, Geoffroy jeune, Bigarré, Ferret, Lheureux, Fessard, Dubois, Martinet et Godard.

 Il n'entre pas dans notre projet de reprendre l'historique des événements qui se sont déroulés dans notre ville au cours de la période révolutionnaire. Ce travail n'est plus à faire d'ailleurs, depuis l'excellente publication de M. Domet (1). Le but que nous poursuivons est plus modeste ; nous nous proposons seulement de suivre notre conseil municipal — nouveau Jérôme Paturot — dans ses pérégrinations à la recherche d'un hôtel de ville.

 Un cycle de cent années (1789 à 1889) lui a été nécessaire pour arriver enfin à se constituer, tant par dons royaux que par une récente, acquisition, une demeure suffisante et convenable.



III

A LA RECHERCHE D'UN HOTEL DE VILLE

Cours des cuisines
La cour des Cuisines, place d’Armes, extrait du tableau de Denis Martin
Panneau de la prévôté Hôtel de la prévôté
L’hôtel de la Prévôté


 Le corps municipal de 1784 établit le siège de son administration dans un local prêté par Louis XVI à la prévôté, place d'Armes, en face le portail Henri IV, alors la principale entrée du château.

 Mais le Roi avait adopté un projet d'agrandissement et de régularisation, au carré, de la place d'Armes. Ce projet comprenait la construction, sur l'emplacement de la prévôté, d'un hôtel de ville important dont la ville aurait été dotée par le souverain sans bourse déliée. Les travaux furent commencés et menés même jusqu'à la hauteur du premier étage. Suspendus en 1788 par suite de l'insuffisance des ressources, la révolution les arrêta pour toujours.Le corps municipal dut se déplacer ; mais il ne se trouva pas pour cela dans l'embarras. Le roi, qui pourvoyait à tout dans la ville, lui donna pour l'installation des bureaux une maison à trois étages faisant l'angle de la rue Basse (aujourd'hui rue du Château) et de la place d'Armes. Cette maison, qui comprenait dix-sept pièces en tout, avait un développement de façade de 5 toises 3 perches sur une même quantité en profondeur. Suffisante pour les bureaux alors peu chargés, et pour le logement des employés, elle ne semble pas avoir servi régulièrement de lieu de réunion à la municipalité. Le plus souvent, les séances se tenaient dans le salon de M. Jarnin de Changeart, le maire, dont l'habitation, assez vaste d'ailleurs, était à proximité  (n°6 actuel de la rue du Château),(I) Journal de Fontainebleau, 1789/1791.

Chevet de l’actuel hôtel de ville Rue Basse, actuellement rue du Château,chevet de l’actuel hôtel de ville  Maison de M.Jamin de Changeart, rue du Château, école Libre des Frères, en réalité l’Hôtel d’Armagnac.

Au nombre de quatreou cinq quand ils étaient au complet, les officiers.municipaux d'alors pouvaient délibérer à l'aise dans un salon. Il n'en put être de même à partir de juillet 1789, lors de l'installation du Comité civil et de police qui était formé de la réunion des délégués des dix sections (1). M. Jamin de Changeart, dépossédé de ses fonctions de maire, ne se sentait guère disposé à offrir l'hospitalité à ses adversaires. La ville, d'autre part, ne possédait aucun local où pût se tenir une réunion quelque peu nombreuse. Comme on ne se gênait pas alors pour demander des faveurs au Roi ou aux fonctionnaires de la Couronne, le Comité obtint de M. de Cheyssac, grand-maître des Eaux et Forêts, la permission de se réunir à son hôtel, rue Basse (depuis maison d'Andigné, actuellement École libre des frères). Les délibérations — souvent fort agitées — eurent lieu dans la salle affectée aux adjudications.

 A l'hôtel de ville provisoire, avait été annexée une petite maison contigüe, rue Basse, pour servir de geôle en attendant la construction de l'hôtel de ville de la place d'Armes. L'occupation ne devant être que provisoire, il n'y avait pas été fait de sérieux travaux d'aménagement en vue de sa destination spéciale, aussi les prisonniers s'en évadaient-ils avec une facilité désespérante pour le malheureux gardien qui n'en pouvait mais.

Hôtel d'Armagnac
Hôtel d’Armagnac, rue du Château
école libre des frères
rue Basse, « depuis maison d’Andignée», école libre des frères


Portail à bossage rustique
 Portail à bossage rustique de l’ancien hôtel des Eaux et Forêts, rue du Château de 1589

 La municipalité régulière, constituée en vertu de la loi du 14 décembre 1789, tint ses séances à l'hôtel des Eaux et Forêts à partir du 18 février 1790. Mais peu après, le service des forêts ayant besoin de tous ses locaux, un nouveau déplacement s'imposa. Nos édiles d'alors se seraient trouvés dans un grand embarras sans le Roi et M. de Montmorin. Sur les démarches, fort gracieusement accueillies du reste du maire, il fut accordé à la municipalité de Fontainebleau, dans le château même, un local « on attendant que la commune pût se procurer un hôtel, celui des Eaux et Forêts n'étant plus disponible et se trouvant d'ailleurs insuffisant pour recevoir toutes les personnes appelées à la mairie ».
 Le garde-meuble du Roi pourvut à l'ameublement.
 L'inauguration eut lieu le 3 avril 1790. Cette première séance fut agrémentée par un incident assez grotesque. Un conseiller grincheux, M. Hulot, avocat, manifesta une fort méchante humeur et interpella vivement M. de Montmorin et ses collègues à propos de ce changement de local.
 On eut beau lui représenter que le déplacement n'avait pu être évité, que d'ailleurs, la municipalité était assurée d'une installation confortable pour un temps indéfini et de se trouver en quelque sorte chez elle, rien n'y fit. La question, mise aux voix, M. Hulot se trouva seul de son avis; de colère, il déserta la séance. Cette première tentative d'obstruction eut pour conséquence d'arrêter la délibération, le conseil ne se trouvant plus en nombre. Mais il ne fut pas ému pour si peu, et, persistant dans sa résolution, il écrivit au curé pour le prier d'annoncer au prône que désormais le conseil municipal « siégerait au palais, cour des Cuisines, la première porte à droite. ».



 Le départ de M. Hulot ne fut qu'une fausse sortie. L'irascible conseiller ne tarda pas à venir reprendre sa place au milieu de ses collègues, non toutefois sans donner de temps en temps des preuves de son mauvais caractère.

 Les réunions de la municipalité se succédèrent paisibles et régulières dans la salle de la cour des Cuisines; néanmoins les édiles d'alors rêvaient incessamment d'avoir un hôtel à eux, bien à eux. L'acheter ? il n'y fallait pas songer, l'argent manquant absolument. D'ailleurs, il était entré profondément dans leur pensée de s'adresser au Roi, qui avait déjà entrepris à ses frais sur la place d'Armes la construction, suspendue depuis 1788, d'un hôtel de ville. La cassette royale était obérée, les temps calamiteux ; on n'osa pas demander de nouveaux subsides en argent, mais on résolut de prier Louis XVI d'abandonner à la ville un des hôtels qu'il y possédait : M. de Montmorin n'était-il pas là, toujours aimé du Roi, toujours prêt aussi à faire campagne en faveur de Fontainebleau ?

 Mais quel hôtel demander? L'hésitation ne fut pas longue. La municipalité jeta de suite son dévolu sur l'hôtel du Maine, à cette époque occupé par la vénerie. Cet immeuble avait pour lui « l'avantage d'être situé sur la principale place du marché, » dans le centre de la ville, et sur l'emplacement le plus avantageux » C'est l'hôtel de ville actuel dont la reconstruction presque totale a eu lieu sous l'administration de M. D. Guérin, en 1865.

La répartition de la ville en dix sections ou districts était ainsi établie :
Le quartier de Neuville; les Écoles chrétiennes; l'Étape; la Paroisse; la Chancellerie: le Marché au Blé; la rue Saint- Merry; la rue de France; le Château: la rue Royale.
Chaque district avait un président, un vice-président, un secrétaire, plus une demi-douzaine de membres.
6 Comité de Défense d’Action et de Sauvegarde de Fontainebleau-Georges GALIPON-14 mars 2014-cdasf@neuf.fr-tél 0160748071 La présidence des assemblées, qui comprenait souvent plus de soixante membres délibérants, fut dévolue à M. Courson de Neuville, lieutenant-colonel d'infanterie, chevalier de Saint-Louis. M. de Neuville est mort à Fontainebleau le 16 avril 1792.

Cartouche du plan des Trinitaires
Cartouche du plan des Trinitaires et extrait du plan montrant la Vénerie du roi
la Vénerie
Plan des Trinitaires dressé en 1789 par Pierre BARBIER ingénieur géographe du Roi, on voit la Vénerie, en réalité l’Hôtel du Maine


IV

L'HOTEL DU MAINE OU LA VÉNERIE

 Comme on le pense bien, les officiers municipaux avaient grande hâte d'arriver à la réalisation de leurs désirs. Mais un hôtel à son choix, surtout un hôtel occupé par un service qu'il faut déplacer et réinstaller ailleurs, ne peut s'obtenir du jour au lendemain. Il y avait certaines négociations à poursuivre, des résistances à vaincre. Les voies amiables étaient les seules à employer; M. de Montmorin pouvait, mieux que tout autre, arriver au succès, parce qu'il traitait l'affaire directement avec le Roi. Autre difficulté, le souverain n'avait plus, comme autrefois, la liberté de ses mouvements. L'Assemblée nationale, par son décret du 1er juin 1791, venait d'établir la liste.civile ; les propriétés royales, devenues domaniales, étaient entre les mains du souverain à titre de simple usufruit.
 M. de Montmorin, dont on connaissait tout le dévouement, était incessamment harcelé ; poursuivant sans répit ses démarches au mieux des intérêts de la ville, avec tact et prudence, il avait encore à calmer les impatients.
 Le 6 août 1791, il écrit à ses collègues :

 A MM. les officiers municipaux,

 Je comptais, messieurs, aller à Fontainebleau, aussitôt que les forces me le permettraient, mais malheureusement je suis forcé de partir à l'instant pour Verneuil, pour des affaires très instantes. Je comptais vous porter le don fait par le Roi à Fontainebleau d'une maison pour maison commune, mais cela est différé et je suis comme sûr que cela sera terminé d'ici à peu de temps. Sur la demande que j'en ai faite, j'ai été consulté sur celle qui était la plus convenable et je pense que mon avis sera suivi, surtout d'après ce que M. de Laporte m'a dit hier. A mon retour, j'irai à Fontainebleau très promptement, ayant un grand plaisir à m'y trouver.
 Ne croyez pas aux bruits publics sur le voyage du Roi à Fontainebleau, quoiqu'il ait le désir d'y aller. Il n'en est pas question; je serai fixé d'une manière positive de ce qu'il y aura sur cela, parce que j'ai des personnes qui, en mon absence, sont à l'affût de ce qui pourra être décidé.
 J'ai l'honneur d'être, avec des sentiments de confraternité, Messieurs, etc..

MONTMORIN

 M, de Montmorin disait vrai; la solution était proche. Un mois après, en effet, il communique à la municipalité la lettre suivante qu'il venait de recevoir de l'intendantde la liste civile


 Paris, le 12 septembre 1791.


A M. de Montmorin,

 Sur le compte, Monsieur, que j'ai rendu au roi, de la demande que vous avez faite au nom de la municipalité de Fontainebleau d'une maison pour y tenir ses séances, Sa Majesté a bien voulu consentir à lui prêter l'ancien hôtel du Maine. C'est avec grand plaisir que je vous en donne avis, et je ne doute pas que la municipalité ne trouve dans ce nouveau bienfait de S. M. un motif de plus de continuer à lui donner des preuves de son attachement à sa personne et de son zèle pour tout ce qui peut intéresser son service.
 J'ai chargé le commissaire général au département de la vénerie, de faire retirer promptement de l’ancicn hôtel du Maine tous les effets appartenant à S. M. et de laisser la libre disposition de cet hôtel à la municipalité.
 Je vous prie, au surplus, de la prévenir que les dépenses de son établissement dans cette maison, ainsi que les frais d'entretien pendant tout le temps qu'elle l'occupera seront à sa charge. S. M. aurait désiré pouvoir lui éviter cette dépense, mais la situation actuelle de ses finances ne le lui permet pas.

L'intendant de ta liste civile, la porte.

 Le 26 septembre, le maire dépose sur le bureau les plans de l'hôtel de la Vénerie que venait de lui remettre M. Peyre, architecte des bâtiments du Roi.
 Réunion nouvelle le lendemain, dans laquelle on rédige une adresse au Roi, pleine de lyrisme et de protestations de reconnaissant et respectueux dévouement envers le « meilleur des rois ». — On vote des remerciements à M. de Laporte, enfin, on consigne sur le registre des délibérations un témoignage de gratitude au maire, M. de Montmorin « pour l'attachement et l'intérêt qu'il a toujours pris pour » la commune et dont il vient d'en donner la preuve la plus éclatante ».
 Avant de se séparer, plusieurs membres demandent qu'une inscription soit placée au-dessus de la porte de la maison commune et qu'il y soit inscrit :


HOTEL DE VILLE ACCORDÉ PAR LE ROI LOUIS XVI en 1791

 Cette proposition a été adoptée par acclamation.
 Très pressés d'occuper leur maison, les officiers municipaux songèrent de suite aux travaux d'aménagement de l'hôtel du Maine, en vue de sa nouvelle destination, travaux que le Roi, malgré tout son bon vouloir, ne pouvait prendre à sa charge.

 Messieurs,

 De tout temps le roi, comme seigneur direct de Fontainebleau, avait fourni à cette ville une maison à lui appartenant, pour servir d'auditoire, de maison commune et de prisons. Au moment même de la révolution, S. M. faisait reconstruire cette maison de la manière la plus convenable à ses différentes destinations : les colonnades de ce bâtiment interrompu à son premier plancher en attestant cette vérité, font regretter qu'il ne soit pas achevé ou qu'il ait été commencé.

 Le Roi avait acheté une maison voisine, mais l'exiguïté de ce local n'a pas permis à la municipalité d'y tenir ses séances. La nécessité d'être toujours permanente dans les premiers temps de la révolution et depuis le rétablissement de l'ordre, d'être régulièrement assemblée trois jours de la semaine, sans compter les autres séances extraordinaires et celles du conseil général, l'a mise dans le cas d'accepter un logement que lui a offert, de l'agrément du roi, M. de Montmorin, gouverneur. Le garde meuble a encore garni cet appartement de bureaux et autres meubles nécessaires.

 Mais la municipalité n'a pu s'oublier jusqu'à croire que ce local fût accordé à perpétuelle demeure. Pleine de confiance dans la bonté du Roi, elle l'a fait solliciter pour qu'il voulût bien lui accorder définitivement une maison dans la ville où elle pût tenir plus convenablement ses séances. Sa Majesté secondant ses désirs vient en effet de lui accorder l'hôtel de la Vénerie, situé sur la principale place du marché, dans le centre et l'emplacement le plus avantageux.
 (Suit la demande de subvention.)

Les officiers municipaux:

 Cette demande ne fut pas accueillie ; il ne parait même pas qu'il y ait été répondu.
 La patience n'était pas la dominante de nos officiers municipaux ; ils harcelaient M. de Montmorin afin d'arriver sans retard à prendre possession de l'hôtel de leurs rêves. L'excellent M. de Montmorin ne cessait de les engager à ne pas désespérer si vite, les assurant que le Roi ne reviendrait pas sur la parole donnée et leur représentait les délais que nécessitait la réinstallation de la Vénerie, etc.
 Il ne suspendait cependant pas ses démarches, car le 29 octobre 1791, il écrivait à M. de Laporte :

 Monsieurs,

 La municipalité de Fontainebleau me charge de vous prier de vouloir bien la mettre en jouissance de la maison que vous avez bien voulu lui faire accorder par le Roi pour une maison commune et le plus tôt possible. Ne penseriez-vous pas qu'il serait à propos de donner un titre de prêt, avec autorisation de faire les changements nécessaires pour l'établissement de la municipalité, mais à ses frais. Il serait possible que vous permettiez que la municipalité nomme deux commissaires tant pour recevoir la maison que pour empêcher qu'on la dégrade, et comme cette expression pourroit choquer, on pourrait seulement les charger d'assister au déménagement et recevoir la maison. Je crois que vous pouvez faire ce que je demande sans inconvénient.
 J'ai l'honneur d'être avec un respectueux attachement, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.

MONTMORIN

 Quelques jours après cette lettre, le maire adresse une nouvelle communication à la municipalité :

A M. de Laporte.
A MM. les officiers municipaux; de Fontainebleau.

 J'ai vu M. Capet (1) et suis convenu avec lui qu'il allait, d'après l'état que vous m'avez envoyé, s'occuper de rédiger l'ordonnance pour me mettre à même d'en toucher le montant d'ici sept ou huit jours, au plus tard (2). Aussitôt que j'aurai reçu cette somme, je vous la ferai passer.
 J'ai vu M. de Laporte pour la maison commune dont vous désirez entrer promptement en jouissance. Il va donner des ordres en conséquence, et pour qu'il ne l'oublie pas, je lui ai écrit et lui ai demandé, comme de mon chef, qu'il y ait deux commissaires chargés par la municipalité à l'effet de recevoir la maison, d'assister au déménagement et de veiller à ce qu'il n'y ait rien de dégradé. Il a trouvé que c'était fort juste et m'a promis une réponse très prompte. Je ne l'ai pas encore reçue et je compte le voir demain pour le presser à ce sujet.
 M. de Laporte m'a parlé aussi du projet qu'il avait de faire transporter le tombeau de Louis VII dans l'église paroissiale de Fontainebleau (3), mais il ne le peut pas dans ce moment, parce que, de nouvelles règles qu'il m'a dit que le Roi voulait établir dans l'administration de ses bâtiments ne lui permettaient pas de faire faire des dépenses extraordinaires auparavant que ce travail soit fait. Aussitôt qu'il y aura possibilité de faire cette translation, il la fera opérer, ayant beaucoup à coeur, à ce qu'il m'a paru, d'obliger Fontainebleau, surtout tant qu'elle aura une aussi bonne conduite que celle qu'elle a eue jusqu'à présent.
 Recevez les nouvelles assurances des sentiments de confraternité, avec lequel j'ai l'honneur d'être, etc.

MONTMORIN

(1) Commissaire chargé de la trésorerie de la Liste Civile.
(2) II s'agissait d'un subside accordé par le Roi.
(3) Cette translation — aux frais du Roi, bien entendu — avait été itérativement sollicitée par plusieurs délibérations du conseil.

 On trouvera sans doute que la transmission de l'immeuble se faisait relativement attendre. Le don ne datait pourtant que de deux mois et l'hôtel, encore occupé par la Vénerie, ne pouvait être évacué qu'autant qu'une nouvelle installation de ce service aurait été préparée. Les officiers des chasses ne se hâtant guère de faire place nette, opposaient ainsi une sorte de force d'inertie. C'est sans doute à ce peu de bon vouloir que fait allusion M. de Montmorin dans la lettre qui suit, la dernière que nous aurons à citer. On ne songeait pas à résister à une décision prise, mais il est certain que des moyens dilatoires furent tentés. Une démarche faite en quelque sorte in extremis, par M. Lelong1, inspecteur de la Vénerie, nous en fournit la preuve.

 Le 5 novembre, M. Lelong, quoique non guéri encore des suites d'une récente opération chirurgicale, annonce son arrivée à Fontainebleau pour le lendemain ou le surlendemain; Entre temps, se gardant bien de mettre en jeu le personnel de la Vénerie, il expose aux conseillers municipaux le chiffre important de dépense qu'entraîneront le déplacement et la réinstallation du matériel dans un autre local. Sans s'élever contre les ordres reçus, il arrive néanmoins à leur demander « s'ils » ne pourraient s'arranger pour obtenir qu'une autre maison inactive appartenant » au Roi fût plutôt destinée à la tenue des séances du Conseil.»

 La municipalité n'entendait pas de cette oreille ; il lui fallait son hôtel du Maine, si favorablement placé au centre de la ville. M. de Montmorin fut de nouveau sollicité; voici sa réponse, dictée, comme toujours, par la sagesse et la bienveillance :

Paris, 27 décembre 1791. Messieurs,

 Je ne perds pas de vue un instant les intérêts de la commune et c'est pour ne pas les compromettre que j'ai pris le parti de ne pas presser M. de la Porte, qui a la plus grande envie de faire ce que nous désirons. Nous avons à combattre les intérêts particuliers de tous ceux qui avaient des logements à l'ancien hôtel du Maine; il y a donc à prouver qu'il n'y a point une aussi grande perte pour le Roi qu'on l'a avancé, que la municipalité ne peut pas être raisonnablement placée 9 Comité de Défense d’Action et de Sauvegarde de Fontainebleau-Georges GALIPON-14 mars 2014-cdasf@neuf.fr-tél 0160748071 ailleurs et qu'en un mot la Vénerie n'y doit pas être placée, par les dangers qui peuvent résulter des chevaux dansant au milieu du marché de Fontainebleau.
 Nous ne pouvons que redoubler de zèle en ce moment-ci, car nous avons des personnes qui cherchent à nous faire du tort, en se plaisant à répandre que nous avons abandonné la conservation de la propriété des plaisirs du Roi et que l'on chasse publiquement et que l'on va au bois avec des charrettes. Le Roi n'est point imbu de cette mauvaise impression; voila l'essentiel pour nous. II sera difficile de faire croire à Sa Majesté que nous soyons capables de cesser un instant de lui prouver notre profond respect et j'ose vous assurer que rien ne pourra changer le cadeau qu'il nous a fait.
Je désire que M. Lebaigue, ou tout autre que vous jugerez à propos, se réunisse avec M. Peyre pour m'envoyer le projet d'établissement de la Vénerie dans une autre maison et ce, sans aucune dépense marquante. Je tiens toujours au projet d'avoir la Vénerie en entier, parce que nous ne pouvons y faire de la dépense qu'étant sûrs d'y faire un revenu. Dans les projets qu'on m'enverra, il n'y a pas d'inconvénient à supposer que nous ne prenions que le devant dessus la rue de Montmorin.
 Je ne sens pas la nécessité que le garçon de bureau de la municipalité soit logé au château. Vous sentirez, messieurs, que cela serait, peut-être, un titre à lui avoir un logement permanent et qu'il lui est très possible de se trouver à la municipalité aux heures fixées. Je vous prie de ne pas regarder ceci comme un refus, mais comme une observation que je vous soumets.
 J'ai l'honneur d'être, avec les sentiments de confraternité, etc..

MONTMORIN

 Nous arrivons enfin à la conclusion de cette affaire qui avait tant passionné notre édiles. Le 14 février 1792, M. de Laporte écrit à MM. les officiers municipaux :

 J'ai rendu compte au Roi, Messieurs, du désir que vous avez de connaître les dernières intentions de S. M. sur lia demande qu'elle avait déjà accueillie avec bonté, de la permission d'établir votre maison commune dans l'hôtel de sa vénerie. C'est avec bien du plaisir que je vous informe que le roi vous accorde la moitié de cet hôtel sise sur la rue de Montmorin. La partie que Sa Mté se réserve sera séparée par un mur (1) de celle que vous occuperez et je viens de donner pour sa construction les ordres nécessaires.

intendant de la liste civile,
LAPORTE

 La saison ne permit pas de faire de suite les travaux d'appropriation ; c'est seulement le 2 juin 1792 que la municipalité put tenir sa première séance à l'hôtel du Maine. Bien avisée, son premier soin fut d'emporter du château le mobilier qui avait été mis à sa disposition par le garde-meuble.
 « Ce jourd'hui, dit le procès-verbal, ont été transférés à la maison commune accordée par Louis XVI les meubles qui étaient et servaient dans la salle des séances de la municipalité, au château, dont S. M. avait bien voulu accorder la jouissance. »
 Cet accaparement du bien d'autrui ne laissa pas que de provoquer quelques scrupules chez nos conseillers. M. de Montmorin fut encore prié d'intervenir afin d'établir une situation plus régulière.

(1) M. de Laporte m'a dit que c'était la volonté du Roi que le mur de séparation fût fait à ses frais. II a approuvé que ce mur soit continué pour laisser la jouissance de la grande écurie [magasin des pompes actuel], Lettre de M. Peyre, architecte du Roi, 19 mars 1792.

 A la séance du 7 juin, le maire rendit compte de sa mission et annonça avoir obtenu « les meubles qui étaient au château et servaient pour la municipalité. « On se contentera d'un récépissé et d'une mention de la durée du prêt des dits meubles,. » ajoutant que la seule réponse à faire était de dire que les dits meubles seraient » rendus aussitôt que possible et qu'après cela on en demanderait l'abandon. »
 Les consciences municipales ainsi soulagées, les meubles en question sont à jamais demeurés en la possession de la ville.

 Au cours des travaux d'appropriation, la plaque commémorative du don royal avait été scellée. Elle était sur marbre noir, gravée en lettres d'or. Fournie par le sieur Mautevaut, sculpteur marbrier, rue Neuve-des-Mathurins, à Paris, elle vint, sous la surveillance de MM. Peyre, architecte du Roi, et Saulgeot, architecte de la ville, prendre la place de celle de la Vénerie (mars 1792).
Mais hélas, cctte inscription, juste témoignage de reconnaissance, ne brilla pas longtemps sur la façade du nouvel hôtel de ville.
 Le moment vint bientôt où l'on dut faire disparaître toute trace du passé, même le plus bienfaisant.
Pour éviter que le marbre rappelant le don fait par Louis XVI à la ville de Fontainebleau ne devint un objectif pour le vandalisme du moment, la municipalité dut, avec une expression de regret, constatons le à son honneur, prendre l'initiative de sa suppression.
 La délibération qui en décide est ainsi conçue :
« 14 août 1792. — Les nécessités commandées par les circonstances de l'aire » ôter de dessus tous les hôtels les armoiries et autres titres quelconques, a fait » aujourd'hui décider la municipalité à faire lever l'inscription au-dessus de l'hôtel » commun accordé par Louis XVI pour y substituer simplement : Maison commune, »


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