Conférences "la rue Béranger" par Georges Galipon



La conférence sur la rue Béranger présentée en Novembre 2008 par Georges Galipon dans le salon Murat de l'hôtel de l'Aigle Noir a recueilli un grand succès devant un public nombreux et intéressé par l'histoire et la découverte des quartiers de notre ville.

La rue Béranger s'inscrit, sur 470 mètres, dans le prolongement de la rue St. Honoré à partir de son intersection avec la rue de la Paroisse. Elle porte depuis le 25 avril 1881 le nom d'un chansonnier parisien très populaire au 19ème siècle, Pierre Jean de Béranger (1780-1881), grâce à un conseiller municipal et au maire de l'époque qui tenaient à honorer d'illustres habitants de Fontainebleau.

Statue de Béranger par Henri Lagrifoul, sculpteur que Georges Galipon avait eu comme professeur à l'Ecole Supérieure des Beaux Arts de Paris.

Auparavant, cette rue portait le nom évocateur de rue "des Petits Champs" et son tracé s'esquissait déjà sur le plan d'Orbay de 1682 dans la prolongation de l'arpent (6595 m2) donné par Louis XIV en 1682 pour y créer un cimetière entre la rue de la Paroisse et la rue des Maudinés (actuelle rue de la Cloche).

Le plan des Trinitaires de 1789, que l'on peut considérer comme le 1er cadastre de Fontainebleau, montre que le tracé de la rue des Petits Champs et le parcellaire sont d'ores et déjà constitués. Les parcelles en bleu appartiennent au Roi, les parcelles en vert aux particuliers.

Photo de P.J.de Béranger
Dans le cadastre de 1817, qui remonte en fait au 1er Empire, se lit la volonté d'une réorganisation administrative avec la numérotation des propriétés et la disparition des enseignes. Ce plan permet d'identifier sans grand risque d'erreur les constructions du 18ème siècle, nombreuses car sous le règne de Louis XV la population bellifontaine s'accroît considérablement (on compte environ 10000 âmes dans le bourg en 1789). Ces demeures édifiées sous la Régence et pendant les règnes de Louis XV, Louis XVI, puis sous le Directoire, forment un front de façades qui cache d'agréables jardins de dimensions variables où il fait bon vivre.

Publié à la fin du règne de Louis-Philippe1er, le cadastre de 1848 est un des plus beaux cadastres connus. Il indique des détails précieux comme les puits, et répertorie les constructions d'époque Restauration, Louis XVIII, Charles X et Louis-Philippe.

Partant du n°2, et jusqu'à la ruelle des Maudinés (n°24), sur une vaste parcelle qu'il avait acquise à cet effet, Louis XV avait fait édifier en 1755 le Grand Hôtel des Menus Plaisirs du Roi, pour servir à la préparation des spectacles donnés au château et au logement des artisans. Ces bâtiments chargés d'histoire furent hélas démolis dans les années 1955-56. Cette démolition préludait à un vaste programme de destruction du quartier cerné par les rues de la Cloche - Béranger - des Bois et la rue Grande dans les années 1970-71, comme le montre un plan qui préfigurait la démolition de Fontainebleau depuis le théâtre jusqu'à la rue de Neuville.

Par-delà, c'était les grandes propriétés qui étaient loties et densifiées. C'est à cette date que des habitants conscients de la perte irréparable que cela représentait pour le patrimoine de la ville et leur cadre de vie créèrent le Comité de Défense, d'Action et de Sauvegarde de Fontainebleau.

Le cadastre de 1848 révèle que la Pourvoirie du Roi existait encore. Ces jardins qui fournissaient le château s'étendaient depuis la place de l'Etape jusqu'à la rue Béranger. Une grande partie subsiste encore sous forme de jardins à l'arrière du front bâti de la rue Grande et de la rue Béranger. A partir de la ruelle des Poitevins dont le sol a été partiellement repavé, des façades bien restaurées, une maison édifiée en 1825 sous Charles X, des maisons 2nd Empire, d'agréables jardins, s'offrent à la vue du promeneur. Un mûrier planté dans la Pourvoirie du Roi à la fin du 16ème siècle, à l'époque de Henri IV, n'a malheureusement pas résisté à la dernière tempête. Ensuite plusieurs maisons d'époque Napoléon III. Au bout de la rue se situe la prison construite sous Louis-Philippe Ier, aujourd'hui musée pénitentiaire, à l'arrière du Palais de Justice. La ruelle des Fourneaux contournait la prison pour rejoindre la rue Grande.

Du côté impair de la rue, l'urbanisation du terrain du cimetière concédé par Louis XIV commence sous le Second Empire. L'église réformée est construite en l894, puis une série d'agréables maisons, dont la maison de M. Sotton, qui selon lui était d'anciennes écuries. Il possède une enseigne, chef-d'œuvre de sa famille qui comportait des compagnons serruriers installés rue de la Cloche. Il y avait également dans cette famille des dinandiers qui avaient la charge de la vaisselle de Napoléon III dont quelques exemplaires, des plats d'étain, sont conservés à la Maison des Compagnons.

Entre la rue de la Cloche et la rue des Bois, tout est pratiquement construit avant 1848. L'hôtel de Bernis, du 18ème siècle, à l'angle de la rue de la Cloche, fut malheureusement détruit dans les années 1960, avec ses dépendances. De même, la laiterie et les écuries de la petite folie construite pour la Princesse de Lamballe par le célèbre architecte du Comte d'Artois, François Joseph Bellanger furent démolies, mais le bâtiment principal subsiste au N° 15. Il porte encore dans un médaillon sur sa façade côté jardin la devise : "Parva quidem sed... " (petite certes ... mais confortable).

Médaillon hôtel de Lamballe
Il fut agrandi vers 1825 (règne de Charles X), puis devint successivement couvent des Dames Augustines jusqu'en 1863, et collège ensuite en attendant la future construction du collège Carnot en 1882. Ce bel ensemble échappa à la destruction grâce à l'intervention du CDAS.

Fronton de l'ancien couvent des Augustines
Rue Béranger



Au N° 17 habitait le Dr Cantonnet dont l'un des aïeux fut médecin des enfants princiers sous Napoléon III qui fit don à la famille de plusieurs maisons dans le quartier en remerciement des soins prodigués.
Au n° 27 se trouve la maison Simon, fournisseur de la Maison des Compagnons, où nous allions acheter les matériaux de construction avant le transfert de ce commerce à Vulaines. On doit à M. Simon d'avoir retrouvé en mairie la date de l'attribution du nom de Béranger à la rue.

Puis au n° 29 la maison bien restaurée où vécut Béranger possède une plaque apposée sur la façade : "Cette maison a été habitée par Béranger 1835 - 1836 " .Cette demeure fut également celle de Iacoub Habaïbi, qui a soutenu Bonaparte lors de la campagne d'Egypte, puis combattu au côté de l'Empereur dans toutes ses campagnes et fut nommé colonel des mamelouk. Il s' installa dans la maison dès 1814, participa à la conquête de l'Algérie, organisa le premier bataillon de zouaves, puis y revint jusqu'à sa mort en 1848.

Statue de M. Béranger



Au n° 33, une maison néo-cubiste a été construite dans les années 1970 par l'architecte Giardinat. Au n° 35, la maison du 18ème siècle figure déjà sur le cadastre de 1848. Puis, en traversant la rue des Bois, la 3ème partie de la rue Béranger qui portait autrefois le nom de rue des Fourneaux, commence avec le n° 37 dont la belle façade à perron s'inscrit dans l'angle coupé des deux rues. Des documents conservés à la Bibliothèque Municipale attestent que le frère de Baudelaire a séjourné là et qu'une correspondance dans laquelle Fontainebleau était évoqué s'était établie entre les deux frères.

Puis au n°39 se dresse un immeuble collectif présentant une façade à jeu de briques de deux couleurs, suivi au n° 41 de la maison de la famille Philardeau, dont l'un des membres fut un médecin réputé de la ville (un pavillon de l'hôpital porte son nom). Un immeuble récent construit sur un terrain d'horticulture lui fait suite.

La rue s'achève sur un bâtiment long et bas qui figurait sur le cadastre de 1848 comme asile. Il fut construit sous le règne de Louis-Philippe Ier . Les plans et élévation sont dus au professeur de dessin Baur de l'Ecole de Cavalerie. Il abrite aujourd'hui l'école de musique de la ville.

Médaillon de l'hôtel de Lamballe Médaillon de l'hôtel de Lamballe



Escalier de l'hôtel de Lamballe Escalier de l'hôtel de Lamballe




* Voir l'ouvrage : " Théâtre de Cour ", par Vincent Droguet - Octobre 2005



Un public nombreux

Un public très nombreux